Dossier d’œuvre objet IM14006236 | Réalisé par
Billat Hélène (Contributeur)
Billat Hélène

Chercheur à l'inventaire général du patrimoine culturel de Basse-Normandie puis de Normandie depuis 2013 : architecture civile et religieuse, patrimoine rural, objets mobiliers civils et religieux étudiés dans le cadre d'inventaires topographiques et ponctuels. Suivi scientifique de l'étude du patrimoine bâti du Parc naturel régional du Perche.

Cliquez pour effectuer une recherche sur cette personne.
  • opération ponctuelle, Abbaye aux Dames de Caen
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Normandie - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Caen - Caen-6
  • Commune Caen
  • Adresse place Reine Mathilde
  • Emplacement dans l'édifice rez-de-chaussée de l'ailde sud du cloître, escalier sud-ouest

Le tableau (Inv. 773) est daté vers 1770 sans preuve historique retrouvée à ce jour. II a été acquis avec quatre autres (Saint Vigor, Sauvetage du moine Placide, Vision de saint Benoît de Nursie)- dont l'un (Saint non identifié) a depuis officiellement disparu (jugé en trop mauvais état par le pôle conservation-restauration de la Fabrique de patrimoines en Normandie, il a été détruit) - par la Région Basse-Normandie le 23 mai 1986 à la commune de Cerisy-la-Forêt qui décide par délibération du 2 mai 1986 de les lui vendre pour un montant global de 25 000 francs (3 811 euros). Alerté par l'état de péril de ces œuvres, entreposées sur décision du prêtre affectataire dans les parties hautes du bras sud du transept de l'église abbatiale de Cerisy-la-Forêt en 1870, puis dans celles du chœur, l'abbé Lelégard (1925-1994), conservateur des antiquités et objets d'art de la Manche, engage des négociations en 1985 avec les collectivités, l’État, le prêtre affectataire et l'association des Amis de l'Abbaye, pour les sauver. La Région Basse-Normandie, récemment installée dans les bâtiments de l'ancienne abbaye aux Dames de Caen, est pressentie pour les accueillir et les restaurer. La collectivité est alors en recherche d'objets mobiliers pour meubler les espaces collectifs et de réception ainsi que l'Hôtel de Région. Elle peut assurer financièrement l’acquisition de cet ensemble et sa restauration tout en disposant de cimaises pour son exposition. Une repose dans l'église abbatiale de Cerisy paraissant compromise, faute de place, il a paru pertinent de pérenniser leur exposition dans l'ancienne abbaye caennaise soumise à la règle bénédictine comme celle de Cerisy.

La représentation de la mort de sainte Scolastique se réfère ici au récit de la Légende dorée de Jacques de Voragine : "Trois jours après [que saint Benoît] fut revenu au monastère, en levant. les yeux, il vit l'âme de sa sœur, sous la forme d'une colombe qui pénétrait jusqu'aux profondeurs du ciel : et bientôt il fit porter son corps au monastère où il fut inhumé dans un tombeau qu'il avait fait préparer pour lui." (trad. J.-B. M. Roze, 1902, p. 365). Agenouillée devant un pupitre et tenant un crucifix de la main droite, la sainte rend l'âme symbolisée par la colombe s'élevant vers le ciel tandis que deux anges la supportent. Sa défaillance est dépeinte avec retenue, sans effusion ni grandiloquence. Tant les corps que les objets concourent à cet élan ascensionnel. L’œuvre a été peinte dans le sens de la gravure de Simon Thomassin d'après un tableau perdu de Jean Jouvenet (1602-1674)*. Transcriptions gravées et copies témoignent de la postérité de l’œuvre de Jean Jouvenet jusqu'à la fin du 18e siècle. Cette œuvre de Jouvenet est, avec le tableau de même sujet peint par Jean Restout (1692-1768) en 1730 pour l'abbaye bénédictine de Bourgueil (Inv. 1793-2-2, musée des Beaux-Arts, Tours), l'un des modèles copié en Normandie.

L'ancienne église abbatiale de Cerisy conserve plusieurs tableaux du 18e siècle dont certains sont signés et datés de Don Étienne Hyacinthe Le Fournier (ca. 1745-1801), moine bénédictin de l'abbaye du même lieu actif dans la seconde moitié du 18e siècle - plus exactement durant les décennies 1770-1780 -, peints d'après Charles Le Brun, Louis de Boulogne ou Jean Jouvenet comme l'indique la base de donnée de la conservation des antiquités et objets d'art de la Manche. Bien que ni signé ni daté, le tableau de Caen présente une parenté stylistique avec certaines œuvres de Cerisy, en particulier avec une Déploration du Christ de Don Le Fournier (d'après la gravure d'une œuvre non localisée de Charles Le Brun), où s'observent des similitudes dans le dessin des drapés aux plis lourds, la forme des visages (petits yeux sombres sous des arcades sourcilières linéaires tracées dans le prolongement des arêtes d'un long nez) et la manière de rendre les nuées. L'ensemble des tableaux est dû au même pinceau. Celui de Saint Vigor apparaît plus personnel, peut-être parce qu'il n'a pas été peint d'après un modèle gravé qui rend la manière de l'artiste plus rigide. Il est le seul tableau dont le cadre a pu être sauvé, les autres étant en trop mauvais état. Paul de Farcy indique dans son ouvrage sur les abbayes de l'évêché de Bayeux (1886), que ces toiles avaient été disposées dans les cinq baies du rez-de-chaussée de l'abside, ce que confirme une gravure de John Sell Cotman illustrant les Architectural Antiquities of Normandy. Cela explique leur format cintré et leurs dimensions assez proches : on discerne dans la baie axiale le tableau de Saint Vigor et à dextre, celui de la Mort de sainte Scolastique.

Si Paul de Farcy donne ces tableaux à Don Le Fournier, cette attribution reste à certifier faute de source l'attestant. L'iconographe de ces œuvres, créées pour l'église abbatiale de Cerisy, rend hommage à son fondateur et aux grandes figures de l'ordre bénédictin. Elles forment un ensemble stylistiquement cohérent que la Région Normandie valorise aujourd'hui auprès des visiteurs.

*modèle identifié par Emmanuel Luis, chercheur, Inventaire général du patrimoine culturel de Normandie.

  • Période(s)
    • Principale : 2e moitié 18e siècle
  • Dates
    • 1770, daté par tradition orale
  • Auteur(s)
    • Auteur de la source figurée :
      Jouvenet Jean
      Jouvenet Jean

      Le premier tableau daté (1685) et signé par Jean Jouvenet est L'Annonciation (peint pour les Capucins de Sotteville-lès-Rouen aujourd'hui présenté sur les cimaises du musée des beaux-arts de Rouen). À cette date, le peintre d'origine rouennaise a déjà acquis maturité et renommée comme l'attestent les nombreuses commandes du Roi et de l'Église dont il bénéficie. Jouvenet a travaillé au château de Marly (série de boiseries sur le thème des saisons pour laquelle on lui confie le panneau dédié à l'hiver) et a exécuté "Le May" de Notre-Dame en 1673 (Le Christ guérissant le paralytique, aujourd'hui détruit). La plus prestigieuse de ces commandes est certainement celle qu'il reçoit pour la coupole basse des Invalides (1699) et alors qu'il est en compétition avec d'autres artistes de renom (Charles de la Fosse, Noël Coypel). Pour l'exécution de cette commande Jean Jouvenet procède par étapes. Il commence par présenter à Louis XIV, commanditaire, un ensemble de modelli (terme italien qui désigne une maquette de petit format du projet définitif) sur le thème imposé du ravissement des douze apôtres.. L'artiste s'y montre un inventeur de formes d'une éblouissante virtuosité. À la fin de son existence Jouvenet doit soigner des crises de rhumatisme aigu qui finirent par lui paralyser la main droite. Mais, l'histoire communément admise reteint qu'il a continué à peindre de la main gauche (notamment La Mort de Saint François exécuté pour le couvent Capucins de Rouen).

      Cliquez pour effectuer une recherche sur cette personne.
    • Auteur de la source figurée :
      Thomassin Henri Simon
      Thomassin Henri Simon

      Henri Simon Thomassin naît à Paris de Simon Thomassin (1655-1733), graveur né à Troyes établi dans la capitale. Il est formé par son père puis par Bernard Picart (1673-1733), qu'il accompagne à Amsterdam de 1710 à 1713. Il grave pour le collectionneur Pierre Crozat (1665-1740), financier originaire du Languedoc, d'après les maîtres italiens, les artistes du 17e siècle et de son temps. il est reçu à l'Académie en 1728. Graveur ordinaire du Roi et de son Académie, il expose au Salon de 1737 à 1740. Il est établi à Paris en 1741, aux "Galeries du Louvre paroisse St Germain l'Auxerrois".

      Cliquez pour effectuer une recherche sur cette personne.

La toile est tendue sur un châssis à traverses. La couche préparatoire rouge sous-jacente est apposée sur une toile composée de deux lés.

  • Catégories
    peinture
  • Structures
    • support, rectangulaire vertical, cintré
    • non encadré
  • Matériaux
    • toile, support, en 2 lés peinture à l'huile
  • Mesures
    • h : 335 centimètre
    • la : 185,5 centimètre
    • la : 70 centimètre (largeur du lé dextre)
  • Iconographies
    • sainte Scolastique, agenouillé, scène, de trois-quarts
    • ange, de profil, de trois-quarts
    • colombe
    • crosse
    • croix
  • Précision représentations

    La colombe représente l'âme de sainte Scolastique s'élevant au ciel, conformément au de récit sa mort, notamment relatée par saint Grégoire le Grand dans ses Dialogues (livre II) : cette colombe a été vue par son frère jumeau, saint Benoît, alors qu'il priait à une fenêtre de sa cellule. Représentée en abbesse bénédictine, elle expire, soutenue par deux anges. Elle tient un crucifix tandis que reposent à ses pieds le livre de sa Règle et sa crosse. Sainte Scolastique serait décédée dans sa 63ème année dans le monastère de Plombariole qu'elle aurait fondée au Mont-Cassin, non loin de celui de son frère.

  • Inscriptions & marques
    • inscription
  • Précision inscriptions

    Inscription (latin , sur le livre posé aux pieds de la sainte) : In te [D]om[ine] / speravit[sic] / non conf[undar] / in aetern[um] / In justitia / tua libera [me]/ P. 30 [C'est en toi, Seigneur, que j'ai espéré / Que je ne sois jamais confondu / Délivre-moi par ta justice Psaume 30].

  • État de conservation
    • oeuvre restaurée
    • repeint
    • oeuvre restaurée
  • Précision état de conservation

    État en 2014 :

    -Support : déficit de tension sur le châssis ; marques du châssis sur l'avers ; bordage de papier kraft transpercé par des semences oxydées ; toile également maintenue par des clous plantés sur l'endroit. -Couche picturale : usures laissant transparaître la couche préparatoire ; craquelures circulaires et multidirectionnelles ; présence de repeints.

    Le tableau a été restauré en 1988 par Christine Goubot. Détail des interventions : pose d'une pièce et de bandes de tension, consolidation des traverses du châssis, refixage par la face des zones lacunaires, nettoyage de la couche picturale et allègement des repeints, réintégration des lacunes.

  • Statut de la propriété
    propriété de la région, Ensemble de cinq tableaux acquis le 23 mai 1986 à la commune de Cerisy-la-Forêt qui décide par délibération du 2 mai 1986 de les vendre à la Région Basse-Normandie pour un montant global de 25 000 francs (3 811 euros) "avec la possibilité de les rétrocéder au Conseil général de la Manche afin de les placer dans la future maison du Département de la Manche sans qu'aucun recours puisse être exercé de part et d'autre contre la commune".
  • Intérêt de l'œuvre
    À signaler

Ce tableau présente l'intérêt d'être une copie réalisée d'après la gravure d'un tableau perdu de Jean Jouvenet. Il est supposé contemporain des œuvres d'un moine de Cerisy, Don Le Fournier, qui pourrait peut-être en être l'auteur. Une inscription au titre des monuments historiques pourrait être étudiée.

Documents d'archives

  • CAOA MANCHE. Cerisy-la-Forêt : dossier documentaire (sources manuscrites et imprimées).

    Conservation des Antiquités et Objets d'Art de la Manche, Saint-André-de-Bohon

Bibliographie

  • FARCY, Paul de. Abbayes de l'évêché de Bayeux. Laval : Impr. de L. Moreau, 1886-1888.

    Archives départementales de Seine-Maritime, Rouen : BHN 214, 288
    t. I, p. 12, 44-45

Documents figurés

  • Abbey Church of Cerisy : Interior of the choir. Eau-forte, John Sell Cotman, tiré de : Architectural antiquities of Normandy. Londres : J. and A. Arch, 1822, pl. 97.

    Bibliothèque municipale, Caen : RES C 876
    pl. 97

Annexes

  • Paul de Farcy, Abbayes de l'évêché de Bayeux. Laval : Impr. de L. Moreau, 1886.
Date(s) d'enquête : 2013; Date(s) de rédaction : 2014
(c) Région Normandie - Inventaire général
Billat Hélène
Billat Hélène

Chercheur à l'inventaire général du patrimoine culturel de Basse-Normandie puis de Normandie depuis 2013 : architecture civile et religieuse, patrimoine rural, objets mobiliers civils et religieux étudiés dans le cadre d'inventaires topographiques et ponctuels. Suivi scientifique de l'étude du patrimoine bâti du Parc naturel régional du Perche.

Cliquez pour effectuer une recherche sur cette personne.