L'usine de Perpignan constitue l'une des huit unités de production exploitées par les Fonderies de Romilly et le premier site mis en place. Elle est créée en 1782 à l'emplacement de deux moulins à foulon fondés à la fin du XVIe siècle et reste l'unité de production principale des fonderies de Romilly jusqu'à leur fermeture en 1896.
Au moment de sa mise en service, en 1782, l'usine comprend une fonderie (à fourneaux à réverbère), un laminoir et une batterie de martinets. D'après un rapport militaire de 1825, l'usine de Perpignan compte pas moins de cinq roues hydrauliques pour alimenter ses ateliers en énergie : "deux font mouvoir un laminoir double et une grosse cisaille, deux autres un laminoir simple de 2,30 m de table. De plus chacune des deux roues donne alternativement le mouvement, l’une à un laminoir simple pour le cuivre jaune, l’autre à un moyen marteau et à une grosse cisaille pour les clous à bordage et les casseroles. Une autre roue fait marcher un laminoir cannelé, un soufflet de la grosse forge, un marteau et une meule. Cette première chute embrasse la totalité de la rivière. Se trouvent aussi construits : une grande fonderie à six fourneaux à réverbère dont la capacité est pour chacun de 1 500 à 1 600 kg, une fonderie de 10 creusets pour le cuivre jaune (chaque creuset peut contenir 20 kg de métal), un atelier de forgerons pour l’entretien des machines, un atelier pour confectionner les clous à bordage pour la marine, un atelier pour le décapage des cuivres et les cisailles à la main, un grand magasin pour la charpenterie et la chaudronnerie, un atelier de menuiserie et de tonnellerie".
La principale transformation de l'usine de Perpignan a lieu en 1833-34 lorsque que les administrateurs des Fonderies de Romilly décident de moderniser leurs installations en reconstruisant les ateliers dédiés au laminage et le bâtiment voisin abritant la forge. A leur place est édifié un nouvel atelier de type grande halle, mesurant 43 m sur 30 m, conçu par l'ingénieur Achille Ferry. Au même moment, les cinq roues hydrauliques sont remplacées par une immense roue de type Poncelet, la première installée dans la vallée de l'Andelle ! Ces réaménagements correspondent à une période de forte extension de l'usine à l'issue de laquelle le plan d'origine de l'usine ne résistera pas.
Comme les autres unités de production qui constituent les Fonderies de Romilly, l'usine de Perpignan est réglementée par l'ordonnance royale de 22 janvier 1843.
Au début des années 1860, la roue Poncelet est remplacée par une turbine Koechlin, remplacée à son tour au début du XXe siècle par une turbine Francis d’une puissance de 500 000 kW/h (aujourd'hui démontée). Au moment du rachat des Fonderies de Romilly par la société Létrange en 1857, l'usine de Perpignan, en activité depuis 75 ans, est dans un état de vétusté avancée. Elle est néanmoins maintenue en service jusqu'en 1896, date à laquelle le travail du métal est arrêté définitivement.
En 1901, l'usine de Perpignan est reconvertie en verrerie spécialisée dans le flaconnage pour la parfumerie et la pharmacie par la société des Verreries de Romilly. Jusqu'en 1910, les bâtiments existant font l'objet de transformations importantes : les façades sont reconstruites avec un souci de décor (fronton, grandes baies cintrées...), des ateliers sont détruits pour faire place à des constructions plus modernes abritant les fours de verreries semi-automatiques. En 1923, la verrerie emploie 240 ouvriers. Face à la concurrence des verreries établies dans la vallée de la Bresle, l'usine de Romilly ferme définitivement ses portes dans le courant des années 1930.
Après le Seconde Guerre mondiale, l'usine de Perpignan est morcelée et reprise par différentes entreprises ou artisans qui y exercent des activités variées (stockage, ferronnerie et soudure, production d'aliments pour animaux...).
Chargée de recherches à l'Inventaire général du patrimoine culturel de Haute-Normandie, puis de Normandie, depuis 1992. Spécialité : patrimoine industriel.