Dossier d’œuvre architecture IA76002970 | Réalisé par ;
Chéron Philippe (Rédacteur)
Chéron Philippe

Chargé d'études à l'Inventaire général du patrimoine culturel depuis 1991. Ingénieur d'études (DRAC Haute-Normandie jusqu'à la loi de décentralisation), puis ingénieur et ingénieur principal, Région Normandie.

Spécialités : vitrail (correspondant du centre Chastel pour la Haute-Normandie), patrimoine rural, construction navale, patrimoine militaire (fortifications du mur de l'Atlantique dans le cadre du PCR mur de l'Atlantique), patrimoine aéronautique, patrimoines commémoratifs.

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  • inventaire topographique, canton d'Elbeuf
îlot K
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Normandie - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Seine-Maritime - Elbeuf
  • Commune Elbeuf
  • Lieu-dit
  • Adresse rue des Martyrs , place du Calvaire
  • Cadastre 1974 AO 184, 185, 186, 187, 188, 189
  • Dénominations
    îlot
  • Appellations
    K
  • Parties constituantes non étudiées
    boutique, immeuble, passage, magasin de commerce, galerie, cour

L’îlot K de la Reconstruction elbeuvienne est délimité par quatre artères : la rue des Martyrs (au sud), la rue Jean Jaurès (à l’ouest), la rue Pierre Brossolette (au nord) et la rue de la Paix (à l’est). Les propriétaires concernés se nommaient Chastel, Quidet, Delassale, Félix, Gardin, Brossois. Avec son jumeau, l’îlot P, il constitue, depuis la place du Calvaire, une monumentale entrée de ville, adoptant la forme de deux pavillons-portes cantonnant l’ouverture de la principale voie commerçante d’Elbeuf, la rue des Martyrs. A l’angle de la place du Calvaire, il se développe en avancée sur une galerie couverte bâtie sur pilotis. Cette spécificité occasionna de nombreux problèmes lors de sa mise en chantier. Dès 1951, le maire d’Elbeuf avait fait savoir qu’il souhaitait que soit donnée, dans la reconstruction, la priorité aux îlots bordant la rue des Martyrs, afin que celle-ci retrouve au plus vite son visage d’avant-guerre et son activité commerciale intense, qui structurait la vie de la cité. Mais très vite, des conflits naquirent à propos de l’îlot K, et ce en raison des servitudes incluses dans le Projet de Reconstruction et d’Aménagement d’Elbeuf, approuvé le 30 avril 1947.

Dès l’origine, l’urbaniste Roger Puget avait en effet prévu une architecture ordonnancée pour les deux îlots K et P, avec des passages publics couverts sous les immeubles situés à l’angle de la place du Calvaire. Voici en quels termes il avait spécifié son programme, dans le journal Urbanisme de septembre 1942 : à l’extrémité de la rue du Maréchal Pétain (plus tard rebaptisée rue des Martyrs), sur la place du Calvaire, deux immeubles seront traités en entrée de ville, affirmant nettement l’axe de la composition, au besoin par une hauteur nettement plus élevée que leur voisinage. L’architecte François Herr, qui avait été chargé par le MRU de lui succéder dès 1945, avait conservé inchangée cette partie de son projet : il avait confirmé que dans les deux îlots d’entrée de la rue des Martyrs (le K et le P), il serait aménagé, en bordure des alignements de la voie, des passages publics sous portiques.

Le projet de remembrement d’Elbeuf, à l’étude dès 1945, fit état de ces arcades comme « arcades du domaine public ». Il ne fut fait aucune remarque sur ce point lors de l’enquête à laquelle il fut soumis en 1946. Ce statut fut entériné le 8 janvier 1948, lorsqu’un arrêté transféra la propriété des terrains affectés à la nouvelle voirie nationale au Département des Travaux Publics. Par la suite, et avant la reconstruction effective, il s’avéra que les dommages de guerre des propriétaires de l’îlot K n’étaient pas assez substantiels pour leur permettre de reconstruire en surplomb sur la voie publique, la largeur entre façades ayant été fixée dans le PRA à 12m. François Herr et les sinistrés se mirent donc d’accord pour porter cette largeur à 18m, de façon à réduire la surface des îlots à rebâtir. Mais il fut convenu que l’obligation de construire des arcades serait maintenue. Or, à l’angle de l’îlot K, au débouché sur la place du Calvaire, se trouvait la parcelle de la veuve Quidet. Celle-ci accepta de faire construire les arcades prévues au PRA, mais à condition qu’elle soit placée dans la même situation juridique que les autres riverains de l’îlot K. Elle voulut établir le passage sous portiques sur son domaine privé et l’exclure de toute servitude publique.

Ses raisons tenaient aux dispositions de la loi : en cas d’accident, l’Etat ne serait pas tenu responsable d’un dommage causé à un bâtiment établi sur le domaine public ni à ses supports. Qu’adviendrait-il si un camion venait à démolir par mégarde un pilier de son immeuble ? Ou si un piéton l’endommageait ? Ce serait alors à elle seule de payer les réparations, sans aide. La veuve Quidet opposa donc un refus catégorique à la municipalité d’Elbeuf : sans initiative de sa part, elle ne donnerait pas son consentement pour démarrer le chantier de reconstruction de l’îlot K. En 1952, la situation parut si désespérée à l’administration de la ville qu’elle envisagea de reconstruire l’îlot K sans la parcelle Quidet. Mais une première avancée fut acquise lorsque les autres riverains de l’îlot K acceptèrent une reconstruction selon le mode de la copropriété. les responsabilités en cas d’incident étant alors collectivement partagées.

En février 1953, une nouvelle décision acheva de régler le conflit : la municipalité procéda à un changement d’alignement afin d’incorporer dans le domaine privé des riverains les parties immeubles en saillie sur le trottoir. Ayant obtenu gain de cause, les héritiers de la veuve Quidet donnèrent leur accord pour que débute enfin le chantier de l’îlot K, qui fut inscrit en priorité par un arrêté préfectoral du 24 juin 1953. Les travaux démarrèrent en 1954, mais une nouvelle difficulté survint : le terrain de l’îlot K comportait en effet des ruines à déblayer. Il s’agissait de celles d’un ancien four de boulanger désaffecté, qui appartenait à un étranger, M. Cortesi, qui habitait à l’époque dans un baraquement provisoire de la place Lecallier. Ce four n’avait pas été touché par les destructions de 1940 et 1944 ; il avait fonctionné normalement jusqu’en 1948. L’expropriation fut demandée et M. Cortesi, malgré sa nationalité (il était suisse et de ce fait, n’avait pas droit aux dommages de guerre), obtint une indemnité en échange de son départ. Le terrain une fois libéré, le travail reprit sous la direction de l’architecte en chef de l’îlot K, Jean Bocquillon, assisté par René Bloquel. L’îlot K formait une unité de chantier unique, reconstruite avec les dommages de guerre de six propriétaires sinistrés. L’ensemble de ses constructions était réservé à usage de commerce et d’habitation.

La consistance nouvelle des bâtiments devait être la suivante :

- 2 bâtiments de 2 étages sur caves et rez-de-chaussée, plus combles aménagés ou aménageables, sur les rues Pierre Brossolette et des Martyrs

- 1 bâtiment de 3 étages sur caves et rez-de-chaussée, plus combles aménagés ou aménageables, à l’angle de la place du Calvaire

- 1 bâtiment à simple rez-de-chaussée sur caves, en bordure de la rue Jean Jaurès Vingt-trois nouveaux logements pourraient ainsi être créés, sur une surface pondérée de 4 125 m2.

Le chantier de l’îlot K s’acheva en 1956.

  • Période(s)
    • Principale : 3e quart 20e siècle
  • Dates
    • 1953, daté par source
  • Auteur(s)
    • Auteur :
      Bocquillon Jean
      Bocquillon Jean

      Architecte français.

       biographique : 

      Biographie rédigée par Marie-Laure Crosnier Leconte :

      Matricule de l’Ecole des Beaux-Arts : 9808. Jean Robert Bocquillon, né à Montgeron (Essonne) le 2 avril 1915, fils de ? Bocquillon, et de ? Dieuzy, élève d'Emmanuel Pontremoli et André Leconte, admis en 2è classe le 11 mars 1935, 1è classe le 30 avril 1946, diplômé le 17 novembre 1948 (202è promotion, Un groupe scolaire d'enseignement primaire (communal), mention bien) (architecte à Paris 10è; architecte divisionnaire de la Ville de Paris et du département de la Seine, architecte de l'Office des H.L.M. du département de la Seine; architecte d'opération pour la reconstruction de l'Unité d’habitation de la Zone verte à Sotteville-lès-Rouen (Seine-Maritime) en 1947-56, avec Marcel Lods (architecte en chef); participation à la réalisation des logements Le Madrillet à Sotteville-lès-Rouen (Seine-Maritime) en 1950-56, avec Marcel Lods, André Malizard, Daniel Yvelin, Marc Alexandre; membre de la S.A.D.G. en 1949, démissionnaire le 27 septembre 1956, réintégré en février 1957, figure encore dans l'annuaire 1973; membre du Conseil régional de l'Ordre des architectes, circonscription de Paris [en 1967]; Archives nationales de France, AJ/52/1285, dossier d’élève; Cité de l'Architecture et du Patrimoine, Fonds Marcel Lods, 323 AA).

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      architecte attribution par source
    • Auteur : architecte attribution par source
    • Auteur :
      Société Coopérative Reconstruire
      Société Coopérative Reconstruire

      Société coopérative basée à Rouen, regroupant tous les sinistrés d'Elbeuf.

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      auteur commanditaire attribution par source

La structure générale de l’îlot K est la suivante : un pavillon-porte donnant sur la place du Calvaire, des alignements d’immeubles uniformes rue des Martyrs et une galerie basse à l’arrière. Au débouché de la place du Calvaire, un pavillon-porte annonce l’entrée de la rue des Martyrs, principale artère commerçante de la ville. Bâti sur un sous-sol à usage de caves, il comporte un rez-de-chaussée commercial et trois étages droits d’habitation, surmontés d’un étage en surcroît et d’un étage de comble aménageable, puis d’un toit en pavillon, orné de lucarnes rampantes. L’immeuble s’avance sur un passage public sous portique, soutenu par des pilotis de béton. Sur toute la façade, le quadrillage des poteaux-poutres de béton lissé gravillonné est apparent et alterne avec des panneaux de dalles préfabriquées ayant une surface imitant le gravillon grésé.

Les fondations de cet immeuble sont en béton banché sur semelles. L’élévation est constituée de six ossatures apparentes en béton armé bouchardé (poteaux, poutres et corniches formant chéneaux). Le remplissage des murs est en parpaings de ciment. La charpente est faite de bois et de béton armé, avec une couverture en ardoises d’Angers premières carrées. A l’origine, les balcons à claustra devaient probablement être ouverts (comme sur l’îlot P) et formaient des loggias, introduisant ainsi un subtil jeu de pleins et de vides.

Rue Jean Jaurès, l’îlot K se poursuit par une galerie commerciale basse en rez-de-chaussée, avec des boutiques en ruban. Rue des Martyrs, il se prolonge par une série d’immeubles à usage mixte (rez-de-chaussée commercial, étages réservés à l’habitation), placés en léger retrait par rapport au pavillon-porte. Bâtis sur caves et surmontés de deux étages et d’un toit à croupe couverts d’ardoise, ils sont dotés de portes-fenêtres pour répondre à l’orientation sud de la façade et aspirer à un maximum d’ensoleillement. A noter, à l’angle de la rue des Martyrs et de la rue de la Paix, une loggia à claustra.

  • Murs
    • béton enduit
    • brique
  • Toits
    ardoise, tuile plate
  • Étages
    sous-sol, 1 étage carré, 2 étages carrés, 3 étages carrés, étage en surcroît, étage de comble
  • Élévations extérieures
    élévation à travées
  • Couvertures
    • toit en pavillon croupe
  • Escaliers
    • escalier demi-hors-oeuvre
  • Typologies
    bâti de la Reconstruction
  • État de conservation
    bon état
  • Statut de la propriété
    propriété d'une personne privée

Documents d'archives

  • AD Seine-Maritime, Darnétal, Dommages de guerre, reconstruction en îlots, 238 W / 11 RP 5657, îlot K, Elbeuf.

    Archives départementales de Seine-Maritime, annexe Darnétal : 238 W / 11 RP 5657
  • AD Seine-Maritime, Dommages de guerre, reconstruction en îlots, 238 W / 11 RP 5656, îlot K, Elbeuf.

    Archives départementales de Seine-Maritime, annexe Darnétal : 238 W / 11 RP 5656

Annexes

  • Extraits de la notice descriptive sommaire, par Jean Bocquillon, sommaire de l'îlot K (13 novembre 1952).
  • Extraits du Document de présentation de l'îlot K en priorité (24 juillet 1953).
  • Extrait du journal Paris-Normandie daté du 30 novembre 1950 : La deuxième phase de la reconstruction d´Elbeuf va commencer avec la mise en œuvre des îlots L, M et S. Elbeuf, comme Rouen, pouvait se plaindre d´être la « lanterne rouge de la reconstruction ».
Date(s) d'enquête : 2007; Date(s) de rédaction : 2007, 2024
(c) Région Normandie - Inventaire général
Philippe Emmanuelle
Philippe Emmanuelle

Conservatrice en chef du Patrimoine

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Chéron Philippe
Chéron Philippe

Chargé d'études à l'Inventaire général du patrimoine culturel depuis 1991. Ingénieur d'études (DRAC Haute-Normandie jusqu'à la loi de décentralisation), puis ingénieur et ingénieur principal, Région Normandie.

Spécialités : vitrail (correspondant du centre Chastel pour la Haute-Normandie), patrimoine rural, construction navale, patrimoine militaire (fortifications du mur de l'Atlantique dans le cadre du PCR mur de l'Atlantique), patrimoine aéronautique, patrimoines commémoratifs.

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