Ce tableau (Inv. 2076) a été acquis par la Région Basse-Normandie le 20 avril 1994 auprès de l'artiste pour un montant de 50 000 francs (7 622 euros) dans le cadre d'une commande publique de la collectivité pour une exposition - intitulée En regard de Guernica, de la fragmentation à l'anéantissement - organisée en 1994 à l'abbaye aux Dames à l'occasion du cinquantième anniversaire de la commémoration du Débarquement et de la Bataille de Normandie et plus précisément en hommage aux populations civiles. Les artistes devaient se référer à l’œuvre Guernica de Picasso.

Formé à Paris, à l'Académie Julian et à l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts, Frédéric Brandon entame une carrière de peintre dans les années 1970 tout en exposant au Salon de la Jeune Peinture. Comme son ami Gérard Fromanger (né en 1943), il appartient à la deuxième génération de la Figuration narrative où "l’image figure un récit qui se décline dans la durée, par séquences ou par vignettes, empruntant la technique du cadrage et du montage au cinéma ou à la bande dessinée" (Pascal Goffaux, rtbf.be Culture, 27 juillet 2015). Du drame de Guernica (1937), Brandon découpe des séquences en noir et blanc. Un large plan fixe montre les corps disloqués, issus de la célèbre toile du maître andalou, que les entrailles de la terre paraissent absorber. A l'horizon défilent les scènes de guerre où luisent les corps foudroyés, assemblées plan par plan, décrivant l'horreur des sacrifices consentis au dieu Saturne. En empruntant au cinéma la technique du découpage et du montage, Brandon bâtit autour de l'événement un récit pictural à la manière d'un film. Scindant la composition, il replace les faits dans une logique spatiale et temporelle par laquelle il questionne le sens de l'histoire et de la peinture.