Dossier collectif IA61001467 | Réalisé par
Maillard Florent (Rédacteur)
Maillard Florent

Chercheur associé au Parc naturel régional du Perche depuis 2011, en charge de l'architecture rurale du PNR.

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  • enquête thématique régionale, architecture rurale du Parc naturel régional du Perche
les maisons et les fermes de la commune de Saint-Mard-de-Réno
Auteur
Copyright
  • (c) Région Normandie - Inventaire général
  • (c) Parc naturel régional du Perche

Dossier non géolocalisé

  • Dénominations
    maison, ferme
  • Aires d'études
    Parc naturel régional du Perche
  • Adresse
    • Commune : Saint-Mard-de-Réno

Parmi les 240 repérages (146 maisons et 94 fermes), 14 ont été sélectionnés pour l’étude soit sept fermes et sept maisons.

Repères historiques

Sur l’ensemble des maisons, seules 52 appartiennent au bourg, la plupart (94) se trouvant dans les hameaux de la partie est de la commune où l’activité artisanale prédomine. Aucune maison ne semble antérieure au 16 e siècle. De cette époque remontent au moins 6 spécimens dont le plus marquant est sans conteste la maison de marchand de toiles construite à la Drouinière qui s’apparente à un petit manoir. Du 17e siècle datent 7 maisons dont une maison d’artisan à Beauvilliers. Au 18e siècle, période de relative prospérité, l’architecture rurale (des maisons mais également des fermes) connaît un renouveau avec la construction ou la reconstruction de nombreuses maisons : plus d’une quarantaine sont concernées. Ce phénomène se poursuit tout au long du 19e siècle jusqu’au début du 20e siècle, époque à laquelle de nombreux biens sont également transformés (agrandissement d’ouvertures, réfection des charpentes, adjonction de nouvelles dépendances, etc.).

Bourg, maison de maître dite "villa des marronniers".Bourg, maison de maître dite "villa des marronniers".

Quant aux fermes, elles se localisent en dehors du bourg à l’exception de deux d’entre elles (l’une située au 8, rue de Mortagne, l’autre au 14, rue de Réno). Les plus anciennes semblent remonter au 16e siècle ou, tout du moins, conservent des vestiges de cette époque. Elles se situent à Hommeray, au Grand Chailloué et au Puits. 14 fermes remontent au 17e siècle. Celles de la Planche et du Petit Chailloué en sont de bons exemples. 36 fermes appartiennent au siècle suivant. Les 41 fermes restantes datent du 19e siècle et du début du 20e siècle.

Hommeray, ferme.Hommeray, ferme.

Plusieurs dates (chronogrammes ou mentions des matrices cadastrales) attestant de constructions ou de remaniements ont été relevées : 1645, 1744, 1753, 1768, 1780, 1786, 1789, 1806, 1810, 1813, 1828, 1833 (2 fois), 1837, 1838 (2 fois), 1844, 1846 (2 fois), 1847 (2 fois), 1848 (2 fois), 1860 (2 fois), 1862, 1863, 1864 (3 fois), 1865, 1866, 1873, 1878, 1879, 1899, 1911, 1938.

Au sein d'un plateau céréalier anciennement bocager, l´habitat se trouve dispersé sur l´ensemble du territoire communal, à l’exclusion de la frange est et nord-est colonisée par la forêt du Réno-Valdieu. La commune compte une soixantaine de lieux-dits répartis entre 22 fermes, maisons, châteaux ou moulins isolés et une vingtaine de hameaux qui possèdent pour certains des dimensions importantes (la Roulerie, le Clos des Champs, Valarchin).

Description

Structure et composition d´ensemble

Parmi les 94 fermes repérées, seules deux comprennent un logis indépendant non attenant aux dépendances agricoles, aux Buissonets et à la Maslotières. Plus de la moitié (50 au total) sont de type « bloc à terre » simple : un bâtiment abritant sous un même toit le logis et les dépendances. La laiterie est souvent placée à l’arrière du bâtiment (en façade nord), et la voûte du four se situe généralement sous un appentis contre le pignon et accolé au toit à porcs. C’est le cas notamment à Assite et à Hommeray. Le reste des fermes adopte un plan plus complexe comprenant plusieurs bâtiments.

27 fermes possèdent un plan en « L », une disposition assez courante dans le secteur. Généralement, le bâtiment principal (ou l’aile principale, dans le cas d’un bâtiment unique en « L ») abrite - sous un même toit ou dans des corps de bâtiments juxtaposés aux volumes différents - le logis, le cellier, l’écurie, l’étable, le toit à porcs. Perpendiculaire au premier, le second bâtiment (ou l’aile secondaire) sert de remise (ou grange). Un pigeonnier (deux ou quatre trous de boulin, une ou deux planches d’envol) occupe parfois le comble. Cette répartition s’observe notamment à Cernay, à Monthinot et au Houx.

Sept fermes disposent de deux bâtiments en vis-à-vis (qui se font face) ou alignés : c’est le cas au Coudrey, à l’Hôtel Joly et à Olivet. Situées essentiellement dans la partie ouest et sud-ouest de la commune, neuf fermes comptent trois ou quatre bâtiments disposés en « U » ou en « O » (les Bruyères, la Haie, le Magasin) ménageant au centre une cour ouverte. Au Magasin, se trouve la seule cour de ferme enclose de murs du territoire.

Ces variations résultent bien souvent de l'évolution de l'agriculture comme à la Haie par exemple où l’unique bâtiment d’exploitation placé en vis-à-vis du bâtiment principal sur le cadastre ancien est détruit dans la seconde moitié du 19e siècle au profit de deux bâtiments formant un « U » avec celui existant. La seconde ferme du Puits, formée de trois bâtiments disposés en « U », est une construction ex nihilo des années 1850.

Le Puits, ferme.Le Puits, ferme.

Le logis des fermes est majoritairement en rez-de-chaussée (67) parfois surélevé (neuf). Il peut être surmonté d’un comble à surcroît (pour 22 d’entre eux). Seulement cinq logis disposent d’un étage carré (deux au bourg, ainsi qu’aux Buissonets, au Puits et à la Roulerie).

Concernant les maisons, 44 sont en rez-de-chaussée surmonté d’un étage carré (soit 30 % des maisons). À deux exceptions près, elles se situent toutes au bourg. Au moins 18 d’entre elles sont des maisons disposant d’un petit commerce au rez-de-chaussée surmonté d'une habitation à l’étage. Deux d’entre elles (au 1, rue de Mortagne et au 8, rue de Réno) paraissent avoir été d’anciennes auberges dotées d'un passage d'entrée qui menait aux bâtiments en retour d’équerre à l’arrière dévolus aux dépendances telles des écuries.

En dehors du bourg, de nombreuses maisons d’artisans ont été repérées. Dans les hameaux de la partie ouest du bourg (la Petellière, la Roulerie) comme à l'est en lisière de la forêt (Valarchin), s'est développé un artisanat lié au travail du chanvre (filotiers, tisserands). Mais à l'instar des autres villages en lisière de forêt, l’exploitation du bois (bucherons, fendeurs, scieurs de long, charbonniers anciennement appelés « cuiseurs de charbon ») ou son artisanat (charpentiers, sabotiers, etc.) s'est développé à Saint-Mard-de-Réno, ce dont témoigne encore son habitat implanté sur la frange est. Adaptées à la déclivité du terrain, de nombreuses maisons disposent d’un étage de soubassement (atelier, stockage ou dépendance) et d’un rez-de-chaussée surélevé (habitation souvent à pièce unique). Cinq maisons conservent un escalier extérieur pour accéder à l’étage habitable (Beauvilliers, Valarchin).

Valarchin, maison de tisserand.Valarchin, maison de tisserand.

Profitant de conditions optimales pour cet artisanat (proximité de massifs forestiers, argile de bonne qualité et humidité due à la proximité de cours d’eau), le quart nord-est de la commune s’est spécialisé dans la confection de céramique (poterie et même faïencerie au 18e siècle). Les villages du Clos des champs, des Rieux et des Herbinières conservent des exemples significatifs de maisons de potier ainsi que de four à poterie.

Matériaux et mises en œuvre

Le calcaire extrait localement est largement employé dans les constructions. Il est mis en œuvre dans les maçonneries sous forme de moellons et plus rarement de pierre de taille (au 1, rue de Mortagne au bourg, aux Belles Feuilles, au Puits). Les blocs sont parfois taillés en bossage continu pour obtenir une façade uniforme et régulière (comme à la Hugotière). Les encadrements des baies, les chaînages d´angle, les corniches et les jambes harpées sont en pierre de taille. Pour les bâtiments les plus anciens, la partie basse des chaînages d’angle et des portes, sensible aux remontées d’humidité, est en roussard (un grès ferrugineux très dur). Dans la partie nord-est et sur toute la frange est en bordure de forêt, trois autres matériaux issus du sous-sol sont employés : le silex mis en œuvre sous forme de moellons montés au mortier de terre (le Mafoi), un grès très dure également sous forme de petits moellons montés au mortier de terre (le Pont Chartrain) et le grison, un conglomérat de silex pris dans un ciment ferrugineux que l’on retrouve de manière sporadique dans certaines façades (le Varincent). La brique, dont l´utilisation se cantonne aux encadrements des baies, n´apparaît que tardivement (après 1850) et concerne assez peu de constructions rurales (la Gautrie, l’Hôtel au Feu, la Minerie). Deux matériaux caractéristiques des territoires aux sous-sols pauvres en pierre de construction sont utilisés de manière exceptionnelle : le pan de bois (deux exemples de vestiges de façades postérieures de logis au Chêne et à l’Hôtel au Feu ; et une grange à Beauvilliers dont le niveau supérieur en pan de bois repose sur un étage de soubassement maçonnés en moellons de silex) et la terre crue utilisée pour la construction d’une petite dépendance au Mafoi. Ces types de mise en œuvre étaient très certainement plus répandus par le passé et ont progressivement été délaissés au profit de la maçonnerie en pierre.

La Ménillière, mise en oeuvre du calcaire.La Ménillière, mise en oeuvre du calcaire. Le Pont Chartrain, mise en oeuvre du grès ferrugineux.Le Pont Chartrain, mise en oeuvre du grès ferrugineux.

L'Hôtel au Feu, mise en oeuvre du silex.L'Hôtel au Feu, mise en oeuvre du silex. L'Hôtel au Feu, mise en oeuvre en pan de bois en façade arrière du logis.L'Hôtel au Feu, mise en oeuvre en pan de bois en façade arrière du logis.

Les murs sont traditionnellement couverts d'un enduit plein à base de chaux aérienne et de sable local plus ou moins ocre dont certaines carrières sont encore visibles comme à l'est de Monthinot. Si l'enduit à pierre vue est encore prisé aujourd'hui, il se révèle inadapté pour protéger efficacement le calcaire, une pierre friable et gélive.

Couvertures

Les toits des maisons et des fermes sont en général à longs pans et plus rarement à croupes (au Bourg, la Hugotière, les Herbinières, le Houx, la Ménillière, le Puits). Témoins d’une architecture ancienne, seuls deux bâtiments à pignons découverts et à rampants sculptés subsistent à la Drouinière et au Petit Chailloué. Victimes de remaniements tardifs, la plupart des pignons sont couverts. Les couvertures sont majoritairement en tuile plate. Une tuilerie était d'ailleurs en activité jusqu'au début du 20e siècle au lieu-dit la Tuilerie. Certains bâtiments agricoles sont couverts en tuile mécanique (la Maslotière, le Petit Chailloué). L´ardoise apparaît à partir de 1850 au bourg et sur quelques fermes et maisons rurales (la Hugotière).

Conclusion

L´architecture rurale de Saint-Mard-de-Réno a connu de nombreux remaniements au cours des siècles suite à l´évolution des modes d'habiter et à la mécanisation de l'agriculture. La diversité du bâti de la commune, tant au niveau des activités qui l’ont fait naître que des matériaux de construction, reflète une activité agricole modeste, souvent exercée en complément d’un artisanat lié au travail du chanvre et à l’exploitation de la forêt. L'abondance des reconstructions, des remaniements et des extensions de dépendances agricoles témoigne cependant du développement de l'agriculture qui connaît son apogée entre le milieu du 19e siècle et le premier quart du 20e siècle.

La Drouinière, la Haie, les Herbinières, le Houx, la Hugotière, la Ménilière, le Petit Chailloué, la Planche, le Puits, les Rieux, Valarchin et le Bourg conservent les réalisations les plus significatives du bâti rural de la commune.

  • Période(s)
    • Principale : 16e siècle, 17e siècle, 18e siècle, 19e siècle, 1ère moitié 20e siècle
  • Toits
  • Décompte des œuvres
    • repérées 240
    • étudiées 14

Bibliographie

  • FISCHER, Roger. Les maisons paysannes du Perche. Paris : Eyrolles, Maisons paysannes de France, 1994.

Date(s) d'enquête : 2015; Date(s) de rédaction : 2015
(c) Région Normandie - Inventaire général
(c) Parc naturel régional du Perche
Maillard Florent
Maillard Florent

Chercheur associé au Parc naturel régional du Perche depuis 2011, en charge de l'architecture rurale du PNR.

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